Le rire au service de la médecine

II) Les mécanismes du rire :

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   Après quelques recherches, nous nous sommes rendu compte que de nombreux mécanismes étaient engendrés par le rire, au-delà de ceux visibles constatés auparavant. Afin de mieux comprendre les bienfaits que le rire engendre sur notre santé, expliquons d'abord ce que le rire engendre dans notre corps.
Les manifestations physiques du rire s'organisent selon trois axes principaux : 
1) L'axe musculaire
2) L'axe respiratoire
3) L'axe de commande neuro-hormonale

1) le rire est une onde qui secoue tous les muscles de notre corps, axe musculaire et respiratoire :

   Afin d'expliquer les différents mécanismes engendrés par le rire, nous avons observé le rire tel une onde, qui se propage des muscles du visage, jusqu'aux sphincters. 
 






   









  Quel étrange phénomène que le rire ! Le rire met en jeu de nombreux muscles dans notre corps, depuis les muscles du visage, les muscle du larynx, respiratoires, et le diaphragme jusqu’à la musculature abdominale et celle des membres : le rire est donc une onde qui se transmet de proche en proche, partant des plus petits muscles du visage jusqu’à nos membres. Cette onde augmente d’intensité proportionnellement à son passage. La musculature striée* ainsi que la musculature lisse* va être touchée.

  Les premiers muscles touchés lors du rire sont les muscles du visage, responsable de l’expression rieuse : les muscles plats (frontal, temporal, petit et grand zygomatique) attirent les coins de la bouche et des paupières vers le haut, grâce à leur contraction. En même temps, les masséters, qui sont les puissants muscles de la mastication se relâchent. Ainsi les mâchoires s’écartent. De plus, les muscles circulaires interviennent aussi dans la contraction caractéristique du visage lors du rire : les muscles des paupières se contractent et le muscle orbiculaire des lèvres se relâchent.  

    Les muscles du larynx et les cordes vocales sont responsables de la vocalisation caractéristique « ha ha » ou « hi hi » du rire. Mais cette vocalisation est provoquée par des inspirations suivies de courtes  contractions du diaphragme et des muscles accessoires de la respiration (scalènes, muscles intercostaux). Ainsi la respiration est modifiée, comme nous avons vu précédemment : en effet, lors de l’inspiration, les muscles les plus puissants de la respiration amplifient la cage thoracique, qui effectue alors des mouvements amples, et permettent une ventilation respiratoire maximmale. Les muscles inspirateurs (surcostaux, scalènes, petit dentelé) amplifient le thorax dans son diamètre antéro-postérieur, mais ils sont moins importants que le grand muscle inspirateur : le diaphragme. Cette vaste coupole musculaire sépare le thorax de l’abdomen, et a un rôle capital dans le système respiratoire : il se contracte lors de l’inspiration, ainsi le contenu abdominal est abaissé de haut en bas, et les poumons se remplissent d’air. A l’inverse, les muscles expirateurs sont moins développés et moins puissants que les muscles inspirateurs, car l’expiration est en grande partie due à l’élasticité pulmonaire, bien qu’ils soient indispensables pour le rire (comme les muscles intercostaux internes ou le petit pectoral qui se relâchent, grand oblique, petit oblique, et transverse de l’abdomen). De plus, le diaphragme aussi intervient dans l’expiration, car il se relâche et remonte, ainsi l’air sort des poumons et les poumons se vident. Lors du rire, le diaphragme se relâche par petites secousses, ce qui provoque l’expiration saccadée lors d’un bon fou rire.

   L’onde du rire poursuit ensuite son cours et touche les muscles des épaules, qui se contractent en provoquant des petites secousses et des relèvements soudains et partiels des épaules. La tête se balance, les mains s’ouvrent, les larmes perlent (les muscles et les nerfs du visage comme les muscles zygomatiques se contractent sur les glandes lacrymales). De plus, les muscles des cuisses, des jambes se décontractent : c’est la grande décontraction, la détente, le relâchement. Enfin, on sait que les sphincters se relâchent, et que la vessie est contractée par le mouvement des muscles abdominaux : ceci explique les nombreuses expressions vulgaires, comme « pisser de rire » !


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*Quelques notions :

- musculature lisse : Les muscles lisses, se contractent lentement et involontairement (activité contractile spontanée).  Appelés également muscles blancs, les muscles lisses sont présents dans la paroi de nombreux organes tels que l'intestin, l'utérus, la vésicule biliaire, les bronches, les vaisseaux sanguins etc... La contraction de ce type de muscle est autonome (involontaire) et dépend du système nerveux autonome parasympathique, qui ne répond pas au contrôle direct de la volonté donc de la conscience.

musculature striée : Les muscles striés sont composés de
fibres musculaires, entourés de tissu conjonctif (l'aponévrose). Ces fibres sont organisées en faisceaux séparés par des cloisons de tissu conjonctif : l'endomysium à l'intérieur des faisceaux et le perimysium autour de chaque faisceau (dans lequel on retrouve des fibres réticulaires, des vaisseaux sanguins et lymphatiques).



2) L'axe neuro-hormonal :

« L’axe neuro-hormonal du rire est l’axe de commande, de déclenchement et d’entretien des mécanismes du rire, dont l’extériorisation sera un phénomène musculaire et respiratoire. »  
                                                                                                                                                                                  Dr Henri Rubinstein
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   Le centre cortical du rire est situé dans l’hémisphère droit* de notre cerveau, plus précisément dans le cortex* préfrontal (contrôle de la personnalité). Cette localisation explique le fait que nous percevons l’humour et le comique comme un tout. Le rire ne passe pas par l’analyse, puisque c’est une caractéristique de l’hémisphère gauche* du cerveau.
Comme on peut le remarquer, en observant et analysant un effet comique, on le détruit.
    L’origine du rire est un stimulus (qui peut être auditif, visuel ou tactile) capté par nos organes sensitifs et ensuite traité par les aires sensorielles du cortex cérébral* où il est brièvement analysé.
Les influx nerveux provenant de ces zones sont alors interceptés par le centre cortical du rire.
Cette zone interagit alors avec le système limbique*, en lui commandant le type de réponse attendue. Le système limbique détermine l’intensité de la réponse, allant du rire discret au fou rire éclatant.
Le système limbique est capable de déconnecter le cortex cérébral (partie consciente du cerveau) d’où le fait que le rire soit incontrôlable et parfois inexplicable.
Il interagit avec l’hypothalamus* qui, en envoyant un message à l’hypophyse (glande endocrine), plus précisément à la partie antérieure de l’hypophyse l’adénohypophyse, lui ordonne de libérer des endorphines (neurotransmetteur*).


   Les endorphines sont des substances chimiques naturelles que notre organisme produit. Participant à de nombreuses fonctions organiques, l'un de leurs effets est de réduire le niveau d'anxiété. 
Les endorphines sont mises en circulation dans le système sanguin et ralentissent la respiration. Elles sont également interceptées par les récepteurs de la douleur.
   L’hypophyse envoie également des influx aux centres végétatifs du système nerveux autonome, situés dans le tronc cérébral. Eux-mêmes envoient des influx aux différentes cibles telles que le cœur (augmentation puis ralentissement du rythme cardiaque), le sphincter anal (relâchement), les glandes lacrymales (sécrétion de larmes), les artères et les bronches (dilatation des muscles lisses) et la vessie (contraction).
   Ces mécanismes stimulent tout d’abord le système nerveux parasympathique* (endorphines…) puis le système nerveux sympathique* (influx nerveux…)

Voir schéma ci-contre

 

  

  


   Le système nerveux autonome libère aussi des catécholamines (hormones de l’éveil, elles mettent l’organisme en état d’alerte) dans la circulation sanguine.

   Les catécholamines sont sécrétées par les glandes surrénales. Elles sont composées à 80% d’adrénaline, qui joue un rôle important dans le fonctionnement du système nerveux sympathique et dont la sécrétion augmente donc l’activité et l’excitabilité de l’organisme, ainsi que la sécrétion du glucose dans le sang.

   Elles sont aussi composées à 20% de noradrénaline, qui joue un rôle dans l’attention, le sommeil, l’apprentissage, les émotions ou encore le rêve, et joue également un rôle dans le système nerveux sympathique. La sécrétion de noradrénaline entraîne une constriction des vaisseaux sanguins ainsi qu’un accroissement de l’activité cardiaque (la noradrénaline est un stimulateur physique et mental). La noradrénaline est une catécholamine proche de l’adrénaline
.



Molécule d’adrénaline (formule brute
C9H13NO3)                                                           Molécule de noradrénaline (formule brute C8H11NO3 )           

* Il semble nécessaire de préciser quelques notions :

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Les deux hémisphères du cerveau :
L’hémisphère droit : siège des activités musicales et artistiques, c’est la partie du cerveau qui reconnaît les formes et les visages.
L’hémisphère gauche : hémisphère logique et analytique (écriture, calcul, langage…).

Cortex cérébral :
Partie périphérique des hémisphères cérébraux, le cortex cérébral est le siège des fonctions neurologiques élaborées (l’intelligence, la pensée, la raison, les mouvements volontaires, la conscience et la sensibilité). C’est la partie consciente du cerveau.

Hypothalamus :

L’hypothalamus est une petite région située au
cœur du cerveau, qui sert de pont entre le système nerveux autonome et le système endocrinien (ensemble des organes sécrétant des hormones dans le sang). Il est en effet impliqué dans la régulation de grandes fonctions comme la faim, la soif, le sommeil ou la température corporelle. Il est aussi impliqué dans le comportement sexuel et les émotions.

Système nerveux sympathique :
 Le système nerveux sympathique correspond à la mise en état d'alerte de l'organisme et à la préparation à l'activité physique et intellectuelle. Il a une action essentiellement excitatrice.

Système nerveux parasympathique :
Les effets du système nerveux parasympathique sont antagonistes de ceux du système nerveux sympathique : les nerfs parasympathiques sont chargés de la conservation et de la restauration de l'énergie de l'organisme après une réponse sympathique au stress.

Système limbique (également appelé cerveau primitif) :
Groupe de noyaux situés dans la partie inférieure du prosencéphale, ayant pour fonction de réguler les émotions et le comportement. C’est le centre neurobiologique des émotions, la partie inconsciente du cerveau.

Neurotransmetteur : Substance chimique fabriquée par l’organisme et permettant aux cellules nerveuses (neurones) de transmettre l’influx nerveux (message)Les neurotransmetteurs constituent le langage du système nerveux, permettant à chaque neurone de communiquer avec les autres. C’est de cette façon que se fait le traitement de l’information : les messages passent à travers les cellules possédant la capacité de fabriquer ces substances dans l’organisme. La colère, la faim, le sommeil, mais aussi la pensée et la réflexion sont les résultats de l’action de ces molécules de communication. Les endorphines et les catécholamines sont des neurotransmetteurs.


Conclusion :

Le rire, comme le stress, agit dans un premier temps sur le système nerveux autonome, qui libère les catécholamines (hormones de l'éveil). Ces catécholamines ont une action accélératrice : la fréquence cardiaque et respiratoire augmentent. Dans un deuxième temps, le phénomène du rire donne l'ordre à l'hypophyse de secrèter des endorphines à effet inhibiteur sur les actions du système nerveux autonome : ainsi les fréquences cardiaques et respiratoires diminuent. Ces phénomènes mécaniques ont été illustrés dans nos deux expériences préalables (nous verrons dans le chapitre suivant les autres effets inhibiteurs du rire).

Nous pouvons conclure, comme dit monsieur Rubinstein que "le rire est un phénomène humain complet, qui joue un rôle fondamental au carrefour des manifestations musculaires, respiratoires, nerveux, psychiques de l'individu."
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